A propos...

Hors-champs en partage.

mercredi 15 février 2012

Histoire de parler

A croire que la flèche propulsée par l'arc tendu comme une mêlée d'arbres a glissé en moi un coeur au carré.
Histoire de parler, bien sûr.
Coeur au carré, ou coeur cassé, ou coeur enchevêtré, ou coeur macéré, oui macéré dans la liqueur lascive de l'espoir si peu essoufflé, encore ? 
Histoire de parler, bien sûr.
Car en réalité, c'est un coquillage qui m'a été offert pour respirer -
un coquillage aux yeux clairs et durcis par la mer -
car en réalité, la mer ne fait pas de cadeaux, tout le monde le sait.
Histoire de parler, bien sûr. 

Publié dans Filigranes n° 28, 1994


Ani-mots




Chacun peut être poète un instant,
un instant,
il suffit de décider qu'entre 11 h et 11 h 30,
- bien sûr, ce n'est qu'un exemple -
on dévisse le couvercle de la casserole,
et une tranche de nous-même glisse par l'interstice...
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Extrait de "Petite source" - Filigranes n° 27, 1993.

jeudi 9 février 2012

Alliages



Alors voilà
Il y avait des ronds et des carrés
Des formes de mots en pointillés
Des gouges invisibles pour sculpter
Le fil entre nous et au-delà

Alors voilà
On voulait se parler et s’écouter
Mais nez contre nez on ne se voyait pas
Et les ciseaux des comment ou pourquoi
Ont peu à peu lacéré avenir et passé

Alors voilà
Peu à peu les ronds sont devenus carrés
On a simplement cassé le sablier
Et le temps a cessé de se moquer  
Des pâles volutes de nos émois   

Puis la géométrie a gelé
Les silences se sont peuplés d’été
Et un nouveau présent est né  



Publié dans Filigranes N°82 "Si rien de radical n'advient", avril 2012


lundi 16 janvier 2012

Cisailles de terres

Deux continents dans son sang
Ses chaussons de coton trop grands

Il a ouvert les yeux sur la nuit
Sa mère / enfuie

Ne jamais y penser
Donc                   toujours

Amiante
Père cisaillé / si tôt aussi
Scie à métaux sur la chair des tribunaux
Pour des actes qu'il n'a pas commis
Jugé à vie
En lui
Etoiles / lotus en pluie
Appelés à la rescousse
Points de suspension aujourd'hui


samedi 1 octobre 2011

Echevelles

Un éclat de nuage
Cristallisé d’écRires
Disperse la tristesse

Un soleil feuilleté
Butiné de sourires
Eclabousse les regards

Les paravents se déplient
Soufflets dévoilés acidulés mais sucrés aussi
Les mots transpirent la glace des années ?
Soyons de soie
Echevelons-nous dans la voie lactée

Né-âge


Tu  cielles tu nuages tu charnelles
Tu ruisselles
Tu soupires tu jettes le dictionnaire
A la lettre W tu erres
Wagonnet Walkyrie  Wali  Wyandottes
Tu rigoles en imaginant cette poule
Qui peut-être aimerait pondre des ruisseaux
Mais école stylos règles de trois voilà
Ça ne se dit pas

Guerrures


On s’enlacera                       hier
Odalisques en vertiges  
Au cœur des cisailles           terre

Le t-…t.e.m.p.s.                   carnet
A spirales
Les mots se flaquent  
L’alphabet                            orage
Les coups pleuvent
En gouttes qui enragent

La – ta – cette – celle-là de – guerre
Eternellement réveillée
Par les fourmis crissantes
De ces bombes d’échos                   trop
Tues
Ces – eux – ces enfants des rues d’Alger
Tués

Tu
Perdu petit tout petit si petit
Vieux aujourd’hui
Tes yeux tes yeux tes yeux tes yeux
Auront toujours dix ans


Publié dans Filigranes n° 81 - novembre 2011

mercredi 30 mars 2011

Sang

Ils n'ont en commun que des riens - loups
  Partagent des horizons félins

Ils assaisonnent leurs torts
De petites pincées de ciel

  Dans le creux de leurs paumes
Fleurit la coriandre des aubes

mardi 15 mars 2011

Entre mondes



« Sur le rivage, en face de chez moi, la mer s’est aperçue de ma présence et me fait fête comme un grand chien »
Italo Calvino (« Amours loin de chez soi », nouvelles)


Sur l’arrondi de ton front
L’univers entier se fond
Appelle mes lèvres ma main
Sur l’arrondi de ton front
Le soleil jamais ne s’éteint

Bombée, ta peau vibre de mots
Ta beauté en arpège
Se goûte comme une page de neige
Tu es là
Après la nuit en échouage
Toute cette luminosité
Explose de toi

T’inviter au monde
Humer les aubes
Goûter les océans   
Dévorer les langues étrangères
Partager la poussière
De questions sans hier
Ce n’est pas un rêve

Entre chaque battement de cils
Le miel de la Terre
As-tu vu
Les arbres parés de caramel ?
Le raisin des lendemains ?
L’indicatif du présent
N’est qu’un temps grammairien
L’essentiel jaillit de la bouche
Ici – maintenant
Le reste ? Lumière en va et vient…


Publié dans Filigranes n° 79 - avril 2011


(c) Anouk - texte et photo


mardi 1 mars 2011

Trêve

Et si nous dévissions le couvercle de la casserole,
et laissions glisser une tranche de nous-même ? 
Le hasard nous lèche
On plonge en à-pic sur les brisants de l'exactitude gloutonne


(c) Anouk - extrait d'un poème paru dans Filigranes (novembre 1993)